Pourquoi Genève peine à employer ses réfugiés

Genève peine à donner du travail à ses réfugiés, démontrent des recherches.
Genève peine à donner du travail à ses réfugiés, démontrent des recherches. Pexels/Karolina-Grabowska
Pierre Cormon
Publié jeudi 19 juin 2025
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#Marché du travail Genève est la lanterne rouge suisse en matière d’emploi des personnes issues de l’asile. Notamment à cause du taux de chômage, ont montré des chercheurs.

Parmi les vingt-six cantons suisses, Genève est celui qui parvient le plus mal à intégrer sur le marché du travail les personnes arrivées au titre de l’asile. Pourquoi? Telle est la question qu’ont examinée des chercheurs mandatés par le bureau de l'intégration et de la citoyenneté du canton. Leurs résultats ont été présentés le 20 mai.

Plusieurs hypothèses ont été examinées: le taux de chômage, la proportion de frontaliers, la proportion de nouveaux migrants, le taux de précarité et la focalisation du secteur économique sur des services à haute valeur ajoutée.

Des analyses quantitatives et comparatives ont été menées par deux chercheurs de l’Institut de recherche appliquée en économie et gestion (IREG), Julien Massard et Laurent Ott. Leur conclusion: le taux de chômage structurel est le seul facteur qui semble vraiment influencer l’intégration des personnes issues de l’asile. Plus il est élevé en comparaison intercantonale, plus difficilement elles parviennent à s’intégrer (en revanche, l’évolution d’une année sur l’autre ne semble pas avoir d’effet sensible).
 


La proportion de personnes issues de l’asile ayant recours à l’aide sociale n’est cependant pas beaucoup plus haute à Genève qu’en moyenne suisse. Cela vient sans doute du fait qu’elles occupent des emplois précaires et mal payés, qui ne leur permettent pas d’être pleinement financièrement autonomes. Plusieurs facteurs les handicapent sur le marché du travail, ont constaté les chercheurs lors d’entretiens. C’est notamment le niveau de langue, des compétentes pas toujours adaptées aux besoins des employeurs, le manque de réseau et de connaissance du marché de l’emploi, etc.

Des mesures pour y remédier?

La langue constitue un facteur primordial, a expliqué un autre chercheur de l’IREG, Dawit Shebatu. Les Africains francophones s’intègrent ainsi plus facilement sur le marché du travail en Suisse romande qu’en Suisse alémanique. Les personnes ayant droit à davantage de cours de langue trouvent aussi plus facilement du travail, a-t-on constaté au Danemark. «Il s’agit de la mesure d’intégration ayant le plus grand impact», relève Dawit Shebatu. L’intégration des personnes issues de l’asile prend du temps, conclut sa collègue Pia Pannatier. L’écart d’intégration entre elles et les natifs sur le marché du travail est encore perceptible après 20 ans et est encore plus marqué chez les femmes.

La forte motivation des personnes réfugiées à travailler rapidement m’a profondément marqué

La Suisse a adopté un ensemble de mesures permettant de favoriser l’intégration des personnes issues de l’asile sur le marché du travail, l’Agenda d’intégration suisse. Ces résultats pourront aider à l’améliorer. «La forte motivation des personnes réfugiées à travailler rapidement m’a profondément marqué», note le conseiller d’Etat Thierry Apothéloz, qui a été voir sur le terrain comment le dispositif fonctionne. Des employeurs ne tarissent pas d’éloges sur leur expérience avec des réfugiés. Les obstacles sont cependant réels. Le site refugees@work a été mis en ligne pour aider les employeurs à les surmonter.

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