Initiative pour l’avenir: un pari coûteux pour les finances publiques
Véronique Kämpfen
Rédactrice en chef
Publié vendredi 14 novembre 2025
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II y a trois ans, la Norvège a passé son imposition sur la fortune de 0,85% à 1,1%. Résultat? Une perte de recettes fiscales due au départ de Norvégiens fortunés au lieu de l’augmentation escomptée. Une erreur de jugement lourde de conséquences.
Dommage pour la Norvège, tant mieux pour les pays qui ont accueillis ces exilés fiscaux. Certains cantons de Suisse centrale ayant une imposition basse sur la fortune ont bénéficié de l’arrivée de ces nouveaux contribuables. La Suisse les attire d’autant plus qu’elle ne connaît pas - ou peu selon les cantons – d’impôt sur les successions en ligne directe. Quel est le rapport entre l’impôt sur la fortune et celui sur les successions? Ils touchent souvent les mêmes personnes et sont liés au contribuable lui-même et à son lieu de domicile. S’il souhaite être moins imposé, il lui suffit de déménager pour réduire sa charge fiscale.
C’est là tout le danger de l’initiative des jeunes socialistes, dite pour l’avenir, qui entend taxer les donations et successions de plus de 50 millions de francs à 50%. Le risque est grand que les personnes concernées décident de quitter le territoire pour s’en prémunir. Les initiants en sont tout à fait conscients, puisqu’ils ont mis une clause dans leur texte qui demande que des mesures soient prises pour prévenir les manœuvres d’évitement fiscal et les départs de Suisse. Inutile de dire que cette exigence est contraire à l’ordre juridique et qu’elle serait, dans les faits, inapplicable. Mais le fait que cette clause existe montre bien la réalité de ce risque. En cas de départ de contribuables fortunés, la Suisse ne perdrait pas seulement les revenus issus d’un tel impôt sur les successions, mais aussi tous les autres impôts liés à ces personnes. Quand on sait qu’à Genève, 1,5% des contribuables paient 70% de l’impôt sur la fortune, on voit bien le danger de ce type de proposition qui ne ferait que vider les caisses de l’Etat au détriment des services à la population.
Un autre problème de cette initiative est qu’elle touche en premier lieu les propriétaires d’entreprises familiales. Pour ces personnes, c’est l’entreprise elle-même qui constitue leur fortune et qui fera donc partie de leur succession. Cette fortune n’est pas liquide, puisqu’elle est constituée de bâtiments, de machines, de stocks, de brevets, etc. Les héritiers seront nombreux à devoir vendre dans la précipitation tout ou partie de l’entreprise pour pouvoir s’acquitter de l’impôt, une hérésie pour le maintien du savoir-faire et des emplois en Suisse.
La Norvège a appris à ses dépens que les contribuables fortunés sont mobiles et qu’ils emportent avec eux non seulement leur capacité contributive mais aussi leurs compétences et leur dynamisme entrepreneurial. Evitons la même erreur et votons non le 30 novembre.
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