#Compétences
Le savoir-être s’impose comme un levier stratégique de gestion des talents.
Pendant longtemps, le monde professionnel a valorisé le savoir-faire, cette capacité technique à exécuter une tâche. Une transformation s’opère en profondeur: celle du savoir-être, qui devient aujourd’hui un critère d’évaluation à part entière. «Le savoir-être a toujours existé. Au début, on appelait ça du feeling. Aujourd’hui, on arrive à dire «je ne le sens pas sur la base de tels critères de savoir-être», explique Robert Monin, directeur exécutif des relations humaines à SIG, invité au forum HR Level Up tenu à Palexpo en juin dernier. Ce glissement du subjectif vers l’objectif transforme les pratiques des ressources humaines. Le regard n’est plus seulement porté sur ce ce que l’on sait faire, mais sur la manière dont on choisit de faire son travail. Ces soft-skills sont notamment l’esprit d’équipe, le sens des responsabilités, l’adaptabilité, l’empathie, l’intelligence émotionnelle, le leadership (même sans poste de manager). «Il y a aussi le respect, c’est-à-dire approcher les gens de manière positive, qui a tendance à disparaître», complète Christian Oberson, président de HR Genève, l’association des professionnels des ressources humaines.
«Les compétences de savoir-être sont davantage mises en exergue dans les offres d’emploi, mais elles y ont toujours été présentes, car la capacité d’interagir avec les autres compte», affirme-t-il. Sont-elles plus attendues chez les cadres? «Oui, et c’est une erreur», rétorque le spécialiste, considérant que ces compétences devraient être exigées de tous les employés d’une organisation.
Mise en situation
Comment évaluer ce qui, par essence, touche à la personne sans tomber dans l’arbitraire? «Le savoir-être est un terrain délicat», concède Robert Monin. «Les managers ne sont pas toujours capables d’expliquer au collaborateur pourquoi il n’a pas atteint le maximum de la note sur cette compétence-là.»
En même temps, vouloir trop objectiver leur évaluation comporte un risque: celui de créer une «usine à gaz» de critères et sous-critères. La solution? Pour Robert Monin, il faut simplifier, tout en s’assurant que le ressenti soit partagé avec des logiques de recrutement au cours de plusieurs entretiens où plusieurs personnes sont présentes.
De son côté, Christian Oberson est d’avis qu’il faut faire preuve de bon sens. «Nous sommes tous en capacité de nous rendre compte si le courant passe ou pas avant d’envoyer la personne faire des évaluations.» Dans un second temps, «il faut mettre la personne en situation en la faisant interagir avec les autres».
Evaluation
Mettre les personnes en situation réelle, c’est ce que propose le Centre de Bilan Genève (CEBIG) en partenariat avec l’Office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue (OFPC). Leur programme d’évaluation, structuré autour de six axes, se déroule sur une demi-journée d’exercices pratiques. Objectif: faire le point sur ses compétences clé, opérables à 99% des emplois. «L’idée est de dépasser les théories sur le savoir-être pour identifier ce que la personne est concrètement capable de faire et de reconnaître autre chose que des compétences techniques», indique Pascal de Bremond, adjoint de direction au CEBIG.
Les six axes évalués? Traiter l’information; communiquer; résoudre des problèmes; organiser; encadrer; travailler en équipe. Autant de compétences essentielles, mobilisées plus ou moins dans tous les postes, y compris ceux sans responsabilités. Bien que le programme semble plutôt adressé aux cadres de par sa nature, il est accessible à toute personne.
Les candidats sont observés et écoutés derrière une vitre sans tain, permettant aux deux évaluateurs d’analyser leurs comportements et méthodes de travail. Ces observations sont ensuite restituées de manière détaillée. Pascal de Brémond souligne une confusion fréquente. «On confond souvent les compétences transférables avec les traits de personnalité. Or, elles peuvent se compléter ou s’opposer. Je peux avoir plein de qualités, mais cela ne dit rien sur ce que je suis capable de mobiliser».
Il illustre son propos avec l’exemple d’une personne empathique travaillant dans le social. «Si elle est trop gentille, elle risque de se faire envahir et de ne pas accomplir correctement sa mission.» Etre gentil ne garantit pas la capacité à prendre des décisions équitables.
En validant au moins trois des six compétences testées, il est possible d’obtenir une attestation cantonale de qualifications délivrée par l’OFPC.
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