Brésil: les biocarburants entre promesses et contradictions
Flavia Giovannelli
Publié lundi 17 novembre 2025
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#Environnement
À la COP 30, il est beaucoup question de promouvoir les biocarburants, une alternative présentée comme plus verte que les énergies fossiles.
A la COP30, qui a débuté le 10 novembre, les experts du Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) et de nombreux scientifiques ont confirmé leurs inquiétudes quant à la faible probabilité d’un maintien du réchauffement climatique sous la barre des 1,5°C d’ici à la fin du siècle, comme prévu dans les Accords de Paris. Le manque d’initiatives concrètes ou d’engagements révisés de nombreux États en est l’une des raisons. De fait, selon le dernier rapport de l’Organisation météorologique mondiale, les niveaux de CO2 dans l’atmosphère ont atteint un sommet en 2024. Les débuts de la conférence ont donc été marqués par un clivage: d’un côté ceux qui préconisent de repousser le seuil à 2°C, de l’autre ceux qui insistent davantage sur les dangers d’un retard dans l’action. Un des leviers possible est une baisse drastique des énergies fossiles. Dans cette optique, le biocarburant est l’un des thèmes qui tiendra la vedette à Belém. Sur le papier, l’idée séduit: recourir à de la biomasse issue du blé, de la canne à sucre ou d’autres céréales qui auront poussé en quelques semaines dans les champs. Actuellement, on voit déjà fleurir ce genre d’initiatives, principalement à partir de biocarburants de première génération. Toutefois, une grande majorité d’entre eux présentent un inconvénient majeur: ils sont produits à base de plantes ou de céréales qui auraient pu être consommées par des humains ou des animaux d’élevage. En d’autres termes, les biocarburants actuels participent à la déforestation ou viennent concurrencer l’alimentation. À cela s’ajoutent d’autres inconvénients notables. Ces cultures s’avèrent gourmandes en eau, une ressource qui se raréfie dans de nombreux lieux de la planète, et nécessitent des intrants (engrais, pesticides).
Retombées négatives
Selon une récente analyse de Transport&Environment1, ces huiles végétales destinées à la mobilité peuvent donner lieu à cette équation frappante: rouler cent kilomètres avec des biocarburants de première génération revient à consommer environ trois mille litres d’eau. Si ce chiffre impressionne, il faut relever que le bilan varie fortement selon le contexte local, la culture, le pays, les pratiques agricoles. Ce n’est donc pas une fatalité, mais une alerte.
Les carburants dits de «deuxième génération», issus de résidus agricoles (paille, tiges de maïs, déchets forestiers), voire d’huiles usagées ou de graisses animales, sont en plein développement. Parmi leurs avantages: ils ne sont pas produits au détriment de l’alimentation humaine ou animale et ils offrent un meilleur bilan énergétique. Leur fabrication est cependant plus complexe et implique des procédés biochimiques (fermentation de sucres extraits de la cellulose) ou thermochimiques (gazéification de biomasse). Là aussi, la tentation d’utiliser des engrais ou des solutions intensives reste présente.
Tous les biocarburants ne se valent pas
Le sujet est dans l’actualité brûlante, car selon un porte-parole de la COP30, cité par The Guardian, le Brésil prévoit de proposer aux participants de quadrupler la production mondiale de carburants non fossiles (biocarburants, biogaz et hydrogène) d’ici à dix ans. Le pays hôte de la COP30 étant le deuxième producteur mondial d’éthanol, cette transition est de plus en plus perçue comme une source de profits conséquents, ce qui risque de mobiliser fortement les lobbies des énergies concurrentes, y compris le solaire. En résumé, tous les biocarburants ne se valent pas. Certains aggravent les déséquilibres qu’ils prétendent corriger, d’autres ouvrent des pistes crédibles vers une mobilité plus sobre.
1 Etude de Transports & Environment, publiée le 9 octobre 2025: www.transportenvironment.org/articles/biofuels-globally-emit-more-co2-than-the-fossil-fuels-they-replace-study
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